Dehors près de la fontaine
Se dresse un grand tilleul ;
J'ai fait sous sa grande ombre
Bien des rêves délicieux.
J'ai gravé dans l'écorce
De nombreux mots très chers,
Et toujours, gai ou triste,
J'ai dû y revenir.
Cette nuit j'ai dû partir
En passant près de lui,
Et bien qu'il ait fait sombre,
J'ai fermé les yeux.
Au bruissement des branches,
J'ai cru qu'elles me criaient :
« Viens donc me voir, compagnon,
Ici tu auras le repos. »
Les vents froids me soufflaient
De face en plein visage,
Mon chapeau s'est envolé,
Je ne me suis pas retourné.
Maintenant bien des heures
Ont passé loin de là,
Et toujours j'entends bruire :
« Ici, tu serais en repos ! »
Wilhelm Müller
Anthologie bilingue de la poésie allemande
Traduction par Jean-Pierre Lefebvre
Gallimard, 1993
Der Lindenbaum
Am Brunnen vor dem Tore,
Da steht ein Lindenbaum ;
Ich träumt in seinem Schatten
So manchen süßen Traum.
Ich schnitt in seine Rinde
so manches liebe Wort ;
Es zog in Freud und Leide
Zu ihm mich immer fort.
Ich musst auch heute wandern
Vorbei in tiefer Nacht,
Da hab ich noch im Dunkeln
Die Augen zugemacht.
Und seine Zweige rauschten,
Als riefen sie mir zu :
« Komm her zu mir, Geselle,
Hier findst du deine Ruh ! »
Die kalten Winde bliesen
Mir grad ins Angesicht,
Der Hut flog mir vom Kopfe,
Ich wendete mich nicht.
Nun bin ich manche Stunde
Entfernt von diesem Ort,
Und immer hör ich´s rauschen :
« Du fändest Ruhe dort ! »
Wilhelm Müller
Winterreise
1827
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Carte postale illustrée de la série Volkslieder in Bilder : Nr. 7 "À la fontaine devant les portes" d’après des originaux de Hans Baluschek. |