30 décembre 2022 5 30 /12 /décembre /2022 08:31

 

Malheureux arbre ! En moi quel tumulte s'élève !

Je sens que vers mon cœur se retire ma sève :

Mes membres ont tremblé, comme ils tremblent souvent

Du frisson qui les glace à l'approche du vent.

Cependant la fraîcheur et la paix m'environne :

Nul choc ne m'avertit qu'il pleuve ni qu'il tonne :

De tous les points divers de l'espace éthéré

La nuit souffle sur moi l'air le plus épuré.

Quel noir pressentiment m'épouvante, me glace ?

M'annonce-t-il ma fin ? moi, dont l'antique race

A peuplé l'univers de tant d'arbres fameux !

La nature me dit que je suis grand comme eux :

Je sens loin de mon tronc se balancer ma tête :

Je sens mes bras des cieux mesurer la hauteur,

Et mes pieds des enfers sonder la profondeur.

Ah, qu'importe ! La mort va m'entraîner peut-être...

Sais-je comment, pourquoi, je commençai de naître ?

Sais-je comment, pourquoi, sitôt je périrai ?

Immobile sur terre, en moi seul retiré,

Je ne vois ni n'entends : aucune voix n'exhale

Le trouble qui saisit mon âme végétale ;

Mais sensible aux objets qui me viennent saisir,

Non moins que la douleur j'éprouve le plaisir.

Cent hivers, m'arrachant ma robe de verdure,

M'ont déjà fait subir leur piquante froidure,

Et, glaçant mes rameaux comprimés et roidis,

Ont chargé de frimas mes membres engourdis :

Mais lorsque du printemps les ailes caressantes

Revenaient protéger mes feuilles renaissantes,

Quel charme de sentir sa main me délivrer,

Ma sève plus active en mes veines errer,

La force déployer mes tiges vigoureuses,

Le germe entrer au sein de mes fleurs amoureuses,

Et se multipliant par mille extrémités,

Rapporter à mon cœur toutes leurs voluptés !

Quelle douceur je goûte à boire la rosée,

Et les sucs de la terre à mes pieds arrosée,

Lorsque des chauds étés les feux étincelants

Brûlent ma chevelure et dessèchent mes flancs !

Dans le recueillement du nocturne silence,

De mon secret sommeil paisible jouissance,

Que semblent respecter le mouvement des airs

Et les hôtes nourris sous mes ombrages verts,

J'attends l'heure où par-tout les chantres de l'aurore

Font tendrement frémir mon écorce sonore.

Si j'ai peine à dompter les vents et leurs fureurs,

Des torrents de la pluie affreux avant-coureurs ;

Si la foudre, sur moi gravant des cicatrices,

M'a déjà de la mort annoncé les supplices ;

N'ai-je donc pas, ô Dieu! sujet de redouter

La perte des plaisirs qu'elle viendra m'ôter ?

Encor plein de verdeur, mon feu va-t-il s'éteindre ?

Je jouis de la vie ; ô Mort, je dois te craindre.

 

 

 

 

 

Népomucène Lemercier

La Panhypocrisiade

ou le spectacle infernal du seizième siècle

Extrait du chant II

Firmin Didot, 1819

 

 

 

Gustave Courbet

Le Chêne de Flagey

 

                  et des arbres...
   

Abricotier     Acacia    Alisier     Aloès     Amandier    Arbre à soie    Arbre de Judée    Arganier  Aubépin   Aulne    Baobab    Bouleau    Caroubier    Cactus     Cédratier    Cèdre    Cerisier    Charme   Châtaignier    Chêne    Citronnier    Cocotier    Cognassier     Cornouiller    Cyprès    Érable      Eucalyptus    Figuier    Flamboyant    Frêne    Ginkgo   Grenadier    Hêtre   Hévéa   If    Laurier    Lilas    Magnolia    Manguier    Marronnier    Mélèze    Mélia azédarach    Micocoulier     Mimosa    Mûrier-platane     Niaouli    Noisetier    Noyer     Ombú    Olivier    Oranger    Orme    Palmier    Pêcher    Peuplier    Pin    Plaqueminier    Platane    Poirier    Pommier   Prunier    Robinier    Santal    Sapin    Saule    Séquoia    Sophora    Sorbier    Sureau    Sycomore    Teck    Térébinthe    Tilleul    Tremble    Tulipier

 

Feuille

Forêt

À ce jour, 1338 poètes, 3070 poèmes

et de nombreux artistes ...

Bonne lecture !

Sylvie Gaté