Lorsque Psyché-la-vie aux ombres rend visite
Dans la forêt diaphane où Perséphone a fui,
Une hirondelle aveugle à leurs pieds précipite
La douceur stygienne, un rameau reverdi.
Les ombres en cohue accueillent la nouvelle
Par des lamentations, se pressent pour la voir,
Et maintes faibles mains se tordent devant elle,
Pleines d'étonnement et de timide espoir.
L'une tient un miroir, l'autre un flacon d'arômes, —
Car l'âme est femme, aimant les petits riens,
Et le crachin léger des plaintes sèches mouille
La forêt effeuillée des transparentes voix.
Dans son doux désarroi ne sachant qu'entreprendre,
L'âme se perd parmi les chênes souterrains,
Souffle sur le miroir, hésite avant de tendre
À son passeur brumeux la piécette d'airain.
1920.
Ossip Mandelstam
Tristia
Traduction par Michel Aucouturier
Imprimerie nationale, 1994
Ossip Mandelstam