À Louis Fréchette
Il est sous le soleil un sol unique au monde. | |
Octave Crémazie. |
Le sais-tu, Canadien, qu’il est beau, ton pays,
Battu des mers, immense, et que le Nord regarde ?
En vain, à l’horizon ta fierté se hasarde
À suivre et voir mourir au loin les monts bleuis.
En vain, sous le ciel haut, de lacs et d’arbres pleines,
S’enfoncent les forêts et se perdent les plaines,
C’est toujours devant toi le sol de ton pays !
Quand mai hausse le ciel, qu’au sein des champs verdis
Feuille à feuille, apparaît l’image des érables,
Quand s’accroît la splendeur de nos bois innombrables,
Et que les framboisiers frangent les chemins gris,
Ton amour, Canadien, dont la main large sème,
Répond-il aux grandeurs de ce vaste poème,
Majesté de la terre, âme de ton pays ?
Quand le long des jours bleus baignant les prés fleuris
Se révèle l’amour du sol que tu travailles,
Quand ton œil attentif au progrès des semailles,
Voit poindre aux feux d’été l’or des grains infinis,
Frère, sais-tu pourquoi, dans les terres profondes,
Parfois, longeant les blés et les avoines blondes,
L’étranger, si longtemps, regarde ton pays ?
Quand le tiède septembre aux semeurs de maïs
Annonce le retour des automnes divines,
Quand le feuillage clair du bouleau des collines
Se mêle aux tons sanglants des érables rougis,
Ô dis-moi si les bois dont la gloire s’achève,
Pleins du charme automnal, n’ont pas bercé ton rêve,
Si tu n’as pas, poète, adoré ton pays ?
1906.
Albert Ferland
Le Canada chanté
Déom Frère éditeur, 1908