6 février 2017 1 06 /02 /février /2017 17:29

 

Il a fait froid : depuis trente ans peut-être

il n'avait plus neigé ainsi

sur la Méditerranée.

D'abord vinrent le gel et le givre.

Ils brûlèrent comme on peut brûler

sans plaie ni flammes,

ils devinrent gris, friables

puis se creusèrent, inconsistants

au toucher, engourdis

et plus inertes que des morts,

les artichauts dans les potagers, les gardénias

dans les parcs, les géraniums.

 

Montés en pierres sèches

quelques murets de soutien s'éboulèrent aussi.

Parmi les roches répandues, la terre

s'éparpilla comme farine

d'un sac blessé.

 

La neige tomba longtemps : pendant quelques heures

on ferma l'Aurelia au Capo Berta.

Il y eut du silence, comme parfois

dans l'attente ou la pensée

d'un miracle.

Puis elle s'arrêta, il faisait nuit désormais, le jardin

était vaste et blanc, inconnu

un jardin

lointain, même s'il suffisait

de quelques marches pour l'atteindre.

 

Certains arbres supportaient la neige

comme par habitude.

Les cèdres du Liban, bien sûr,

les chênes, la ligne crépue

des cyprès, les lauriers

les plus hauts, les aubépines, les néfliers

dont les feuilles ressemblent

aux carènes des barques.

 

Sur les autres, sans vouloir

ou sans pouvoir

trouver sa place,

la neige se balançait :

sur les branches des pins maritimes

dressées comme les bras d'un candélabre,

sur les cimes affûtées en touffes

d'aiguilles drues,

comment pouvait-elle

tenir ?

Et sur les feuilles des palmiers

de Libye, pareilles aux rayons du char

du soleil

où pouvait-elle se poser,

cette étrangère ?

Elle se balançait, entre d'infimes

avalanches.

 

Sur les aloès et les

inaccessibles épis rouges

de leurs premières fleurs

elle voulut s'incruster, faire pression

de son poids

que nul ne soupçonne

si désastreux.

 

Je les ai vus dans une gare, celle

de Vado peut-être, de Varazze

les aloès étranglés, pourris

eux toujours si vivaces

si enclins aux mirages

des oasis, si peu oublieux

du sang et des fibres de la

lumière,

ils étaient atroces, tordus

par une douleur qu'ils ne pouvaient

comprendre, agglutinés

en une foule mortelle, moisis et livides

comme si la putréfaction désormais

était universelle, ordonnée

par les astres.

Sur les aloès, cruelle

s'acharnait

la neige, celle qui se venge :

mais de quels torts ?

 

Les aloès morts à Varazze, à Vado, dans mes

souvenirs d'hiver, rêves

défaits, silencieuses victimes.

 

 

 

 

Giuseppe Conte

Les Saisons

traduit de l'italien par Jean-Baptiste Para

Les Cahiers de Royaumont, 1989

 

 

 

 

 

 

 

Neve sugli aloe

 

 

E' stato freddissimo : forse

da trent'anni non nevicava più

così sul Mediterraneo

Prima vennero il gelo e la galaverna.

Bruciarono, come si può bruciare senza ustioni né fiamme,

si ingrigirono, fatti friabili

e poi cavi, inconsistenti

al tatto, rattrappiti,

più immobili dei morti,

i carciofi negli orti, le buganvillee

dei parchi, i geranei.

 

Anche qualche muretto di sostegno

costruito in pietra viva franò.

Le pietre ruzzolarono, terricio

si sparse come farina da una ferita

del sacco.

 

La neve scese a lungo: per qualche ora

l'Aurelia sul Capo Berta fu chiusa.

Ci fu silenzio, come c'é le volte

che si pensa un miracolo o si attende.

Poi smise, era buio oramai, il giardino

un vasto, biancheggiante, sconosciuto

giardino,

remoto anche se pochi

scalini bastavano a raggiungerlo.

 

Certi alberi reggevano la neve

come se ci fossero stati abituati.

I cedri del Libano, bene

le querce, i crespi

cipressi incolonnati, gli allori

più alti, i biancospini, i nespoli

dalle foglie simili a chiglie

di gozzi.

 

Sopra gli altri la dondolava,

non lo so se era per lei che non voleva

o se proprio non ci riusciva

a prendere posizione:

sui rami dei pini marittimi

protesi come bracci di calendari

e aguzzi su in cima di ciuffi

interi di aghi, lì come

poteva fermarsi?

 

E sulle foglie delle palme

libiche, simili ai raggi

di una ruota del carro

del sole

dove poteva posarsi, quella stranierà?

Dondolava così, tra ripetuti crolli.

 

Sugli aloe, qui già un poco fioriti

con le loro impervie spighe rosse

volle insediarsi, premere

con il suo peso che non

si immagina sia così

rovinoso.

 

Li ho visti in una stazione, poteva

essere quella di Vado, di Varazze

gli aloe strozzati, marciti,

loro così sempre vividi

così sempre intenti a un miraggio

di oasi, così memori

del sangue e della carne che la

luce,

erano atroci, tanto

piegati da un dolore che non potevano

capire, aggrumati

in una ressa mortale, lividi, fracidi,

come se universale ormai fosse il marciume.

Sugli aloe si accavina, era

crudele la neve, una vendicatrice:

ma di che torti?

 

Aloe morti a Varazze, a Vado, nei miei

ricordi d'inverno, sogni

sconfitti, silenziose

vittime.

 

 

 

Giuseppe Conte

Le Stagioni

SG

 

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