Cet endroit qu’on appelle les marais de Jacob :
comme la cave d’une journée d’été
où la lumière surit en un breuvage
au goût de grand âge et de coupe-gorge.
Les géants affaiblis sont si enchevêtrés
que rien ne parvient à tomber.
Le bouleau brisé pourrit là,
au garde-à-vous, comme un dogme.
Je remonte du fond de la forêt.
La lumière renaît entre les troncs.
La pluie s’abat sur mes toitures.
Je suis la gouttière des impressions.
L’air s’adoucit à l’orée du bois. —
De grands sapins, détournés et obscurs,
dont le mufle s’est enfoui dans l’humus de la terre,
lapent l’ombre de la pluie.
Tomas Tranströmer
Œuvres complètes (1954-1996)
Traduit du suédois par Jacques Outin
Le castor astral, 1996
Ken Denning
Photogravure, 2006