13 août 2013 2 13 /08 /août /2013 06:24

 

Le temps torride étreint l'arbre étrangement triste

Tord ses bras végétaux au-dessus de l'étang

Et des chaînes d'oiseaux chargent ce chêne-Christ

 

L'enchanteur n'en est plus l'invisible habitant

Et si ce n'est Merlin qui s'est pris à son piège

Qui demeure captif dans le bois palpitant

 

Sous un ciel sans merci quand le lierre l'assiège

Quel espoir coule encore aux blessures du tronc

Qui gémit sous l'écorce une plainte de liège

 

Il erre par ici d'atroces bûcherons

Il est sous le couvert des haches toujours prêtes

Ah sera-t-il trop tard quand nous reconnaîtrons

 

Le martyre secret dans la mort indiscrète

Et notre propre chair et notre propre sang

Pour jeter au bourreau le grand cri qui l'arrête

 

Lire lorsque la nuit sur la forêt descend

L'INRI d'une défaite à son front de ramures

Et l'arbre porte alors l'écriteau du croissant

 

Écoutez L'ombre dit des noms comme des mûres

Noirs mais entre nos dents de vrais soleils fondants

Chacun d'eux qu'on taisait l'avenir le murmure

 

Chacun d'eux à l'appel de France répondant

Chacun d'eux a l'accent qu'il faut au sacrifice

La gloire n'eut jamais autant de prétendants

 

L'étoile luit plus haut que les feux d'artifice

Ô Mère c'est en vain lorsque le cœur te fend

Qu'on voudrait te cacher le compte de tes fils

 

Chacun d'eux dans la terre ou dans l'arbre étouffant

C'est en vain qu'on voudrait te cacher sa torture

Tu sais qu'on l'a tué car il est ton enfant

 

Et qu'il ne revient plus se pendre à ta ceinture

C'est en vain qu'on voudrait te dire qu'ils ne sont

Que les petits d'une autre ou nés contre nature

 

Des bâtards eux que tu berças de tes chansons

Eux qui trouvaient pour toi le ciel pas assez ample

Dont le dernier regard brilla de ta leçon

 

Pareils à ceux jadis à qui l'on fit des temples

Pareils à ceux naguère aux monuments inscrits

Eux qui nourris de toi sont morts à ton exemple

 

Et n'ont rien regretté le jour qu'ils ont péri

Puisqu'ils dirent ton nom sous la grêle des balles

Préférant de mourir que vive la patrie

 

Ah combien de Merlins sous ces pierres tombales

Et tous les arbres sont des arbres enchantés

Tout à l'heure vous le verrez bien quand le bal

 

S'ouvrira quand brisant le cœur du bel été

L'étoile neigera le long des paraboles

Orage des héros orage souhaité

 

Grande nuit en plein jour cymbales des symboles

Se déchire la fleur pour que naisse le fruit

Le ciel éclatera d'un bruit de carambole

 

Et l'homme sortira de l'écorce à ce bruit

 

 

 

 

Aragon

Brocéliande

Les Poètes des Cahiers du Rhône

Éditions de la Baconnière, 1942 

SG

 

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Bonne lecture !

Sylvie Gaté