19 mars 2018 1 19 /03 /mars /2018 09:00

 

 

19 mars     L'arbre

 

 

 

 

Entre les racines d'ombre

Et la chevelure d'air

Tête en terre terre au ciel

À mi-corps

Apparent et caché

Un nœud

Où tournent enlacés

Le désir que tu as de moi

Et mon désir d'aimer

 

Je t'ai aimé arbre qui me ressemble

Toi qui refusas la cime

Pour mieux étendre

Tes bras d'asile

Où viennent se reposer

Les colombes et les cygnes—

Toi qui t'inclines

Vers moi qui suis venu

Aimanté par ton ombre

Parce que j'ai reconnu

Tes fibres où monte

L'eau embrasée de la sève divine

  

 

 

 

Ephraïm Mikhaël

L'offrande du cœur 

Éditions Saint François de Sales, 1982

 

 

 

 

 

 

18 mars     L'arbre l'hiver

 

 

L'arbre l'hiver se tient

noir

fossile ardent du soleil.

Ligneux, lent, terre

le feu prenant corps.

 

Sourd, l'éclat

tous les rayons rentrés

sans révolution ni sans

que se propage

la clarté du ciel

dedans, depuis le tronc.

 

Droit

se tient l'hiver

un arbre où se concentre

la lumière.

 

 

 

 

Judith Chavanne

Entre le silence et l'arbre

Gallimard, 1997

 

 

 

 

 

 

Louttre.B

Musée de Sens

 

 

 

 

 

 

17 mars     Bouleau à midi

 

 

dans l'ardeur de midi

soudain

 

isolé

fortement

le bouleau —

 

éclatant —  comme quelque Évangile :

 

(autosuffisant — ne dérangeant

personne) —

 

s'ouvrant — constamment :

 

se feuilletant d'un bout à l'autre :

 

(tout — « en Dieu »)

 

 

                                 1997

 

 

Guennadi Aïgui

Toujours plus loin dans les neiges

Traduit du russe par Léon Robel

Éditions Obsidiane, 2005

 

 

 

 

 

 

16 mars     Feu et froid

 

 

Or c'est par le Feu que tout vient que tout
est venu avant la Nuit il y avait
déjà le Feu le Froid n'est venu que plus tard
avec les hommes
 quand ils ont commencé de brûler les arbres…

 

 

Roland Nadaus

 

 

 

 

 

Genowefa Pawlak

Explosion IV

genowefapawlak.com

 

 

 

 

 

15 mars     Le toit de pluie

 

 

Une fille forestière hante ma mémoire

les lys venaient s'endormir dans son corps

flamme d'or, vacillante, dans le miroir

la nuit la tenait par la main.

 

La nuit

elle lisait dans les arbres le destin.

 

La nuit

elle disait la tendresse de l'eau multipliée.

 

La nuit

elle allait, abîmée,

le corps brûlé par ardence d'amour.

 

 

 

 

Danièle Auray

Le sang du silence

Éditions Subervie, 1982

 

 

 

 

 

14 mars

 

 

 

Au bûcher de l'aube

l'arbre brandit son poing blessé

éclaboussant le ciel

du sang noir de la terre.

 

 

 

Claudia Adrover-Sendra

Le moi dormant

1984

Louis-Marie Faudacq

Musée d'Art et d'Histoire de Saint-Brieuc

 

 

 

 

 

13 mars

 

 

Ferdinand Chaigneau

Musée des beaux-arts de Rennes

 

 

 

    Ce crépuscule est bien un feu qui s'est allumé sans bruit dans les arbres, cependant qu'à leurs pieds l'herbe devient peu à peu de l'ombre, de la nuit. (C'est là que l'on pourrait trouver les abreuvoirs pour les disparus, leurs berceaux, leurs litières.) Cela brûle donc sans crépiter dans les arbres, c'est plutôt de l'or épars et un tremblement de bougies ; ce sont plutôt, pour un moment, des candélabres. Là au-dessus, le ciel s'épanouit en pétales à peine jaunes. Il m'apparaît soudain, au-dessus de ce socle ouvragé, immense. Jamais sans doute je ne l'avais vu aussi vaste, aussi grand ouvert. Toute la place qu'il y a là pour le regard, pour le souffle ! Assez d'espace pour que tous les morts s'y retrouvent sans étouffer, à jamais.

 

 

 

 

Philippe Jaccottet

Après beaucoup d'années

Gallimard, 1994

 

 

 

 

 

12 mars

Instant d'embellie :

sur l'arbre nu, un rayon

en averse jaune.

Marie Népote

Les toits me le disent

2012

 

 

 

 

 

11 mars

 

 

 

Bernard Lorraine 

Le Jardin Secret des Poètes

Les Éditions ouvrières, 1984

 

 

 

 

 

 

10 mars     L'arbre ébloui

 

 

L'arbre à l'ombre en forme de lyre

où s'enferment les brebis

au frottement de l'azur

s'accroît d'une flamme

à sa mesure exacte

 

Dans les accrocs de ce feu noir

la lumière s'exaspère

crépite

se multiplie

lumière partout ailleurs

immobile et sans preuve

qui soudain s'en prend au regard

 

Le vent tisonne au sein de cet essaim de guêpes

 

Ainsi vêtu

faisant de ses blessures

écorce d'apparat

et couronné d'oiseaux

— non d'ailes mais de serres —

le vieil illuminé

se veut prophète de son ombre

 

Autour de lui

le temps se tait

                            Les brebis

mâchant leurs dents inusables

rêvent d'un sommeil sans issues.

 

 

 

 

Serge Wellens

La concordance des temps

Éditions Folle Avoine, 1986

 

 

Simone Baltaxé

Le Cèdre

Tapisserie, 1975

 

 

 

 

 

 

9 mars     En soi seul ce sont feuilles et racines

 

 

    En soi seul ce sont feuilles et racines,

   Que ces parfums sensibles à l'homme et à la femme dans les sous-bois sauvages, sur le bord des étangs,

   Que les œillets d'amour, que les surelles des seins, que les doigts se liant plus enlacés que vignes,

   Que la pluie musicale du gosier de l'oiseau caché dans le feuillage au lever du soleil,

   Que les alizés de la terre et de l'amour soufflant des rives de la vie vers la mer vive où vous êtes, ô marins !

   Que les baies attendries par le gel, que les ramilles du troisième Mois tendues à neuf aux jeunes que le dégel invite aux champs,

   Que les bourgeons d'amour en vous ou devant vous, qui que vous soyez,

   Bourgeons qui vont éclore selon les vieux usages,

   Et qui s'ouvrant sous votre chaude caresse de soleil vous donneront forme, couleur, parfum,

   Se feront fleurs et fruits, branches et arbres, sous l'aliment de vos pluies.

 

 

 

 

Walt Whitman

Feuilles d'herbe

Traduction de Jacques Darras

Gallimard, 2002

 

 

 

 

 

 

8 mars     Langage

 

 

Arbre qui brilles dans la nuit, brûlant du feu d'un songe

et d'un cœur intérieur ardent qui vit et meurt,

écriture tracée d'une métamorphose

ancienne et d'une énigme irrésolue,

mémoire de silence, abrite-moi !

Je suis venu vers toi riche de ma parole,

et les mots se sont tus dans ma bouche, endormis.

Alors j'ai vu. Que toute chose dénommée

est un buisson ardent d'où s'élève une voix

qui nous appelle, et non pas que nous appelons,

mais qui brûle en soi-même et toujours se dérobe

au désir que nous eûmes de son nom.

 

 

 

Jean-Yves Masson

Poèmes du festin céleste

L'Escampette, 2002

 

 

 

 

 

 

Marc Chagall

Moïse devant le Buisson Ardent

Musée National de Nice

 

 

 

 

 

 

7 mars    Le pin et le bouleau

 

 

Dans la nuit le grand pin

chuchote à la femme bouleau :

venez calmer mes ardeurs estives

buvez à mes blessures de résine

venez caresser mon derme racorni

humecter mes aiguilles de peine

que je perds pour abolir le temps

dans d'éternelles ruines

 

 

 

Michel Sicard

Exils prochains

Galilée, 2004

 

 

 

 

 

 

 

6 mars     Cœur austral

 

 

La fleur est installée tout en bas,

les pics montagneux se cambrent vers elle,

le vent est au repos,

l'arbre se dresse immobile.

 

Voilà soudain qu'épanoui

au beau milieu de mon cœur

en feu tu es installé en moi, arbre.

 

Nulle part il n'est de repos en moi,

en flammes je pousse des cris,

une mer en toute chose remue.

 

Et voilà qu'eux aussi palpitent,

fleur et arbre,

déjà rouges de leur douceur.

 

 

 

 

 

Henriette Hardenberg

Expressionnistes allemands

Anthologie de Lionel Richard

Éditions Complexe, 2001

 

Kandinsky

Montagne, 1909

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                           

Suedliches herz 

 

 

Blüte sitzt tief,  

Bergspitzen biegen sich hin,

Wind ausgeruht liegt,

der Baum steht starr.

 

Da plötzlich erblüht

mitten ins Herz hinein

brennend sitzt du in mir Baum

 

Nirgend ist Ruhe in mir,

in Flammen schreie ich auf,

ein Meer in allem bewegt.

 

Da zucken auch sie,

Blüte und Baum,

schon rot von ihrer Süsse. 

 

 

 

 

 

 

5 mars    Complainte de l'orange lumineuse

 

Dans un été tranquille,

au sommet d'un nuage,

avec un rire obscur

cette orange saignait.

 

J'ai connu bien des mains,

chacune voulait prendre

en moi ce qu'elle aimait.

Et, me pelant, chacune

m'enlevait ma patrie

qui n'est que de lumière.

 

Mais la lumière en moi

parle avec mes désirs

et je cherche toujours

les vrais liens, les vraies mains

qui me feraient mûrir.

 

Car je vis pour un arbre

qu'aucun regard ne voit,

un grand arbre à venir

pour lequel je suis née

et que j'entends la nuit

m'appeler, m'avertir,

 

m'encourager, me dire

qu'il est mon seul ami.

Un jour, il paraîtra

pour me redonner vie

et je serai son ciel

et sa graine et sa voix.

Vous pouvez me manger

vous ne m'éteindrez pas.

 

Mais les temps sont encore

si loin, si loin de moi

que, bien que lumineuse,

je me sens seule au monde

et voici que je saigne

je ne sais pas pourquoi.

 

Peut-être pour cela.

 

 

 

 

Georges Haldas

Poésie complète

L'Âge d'Homme, 2000

 

 

Louttre.B

Un oranger solitaire - Gravure 1997

Musée de Sens

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

4 mars    L'arbre et le soleil

 

 

L'arbre et le soleil

                ne font plus qu'un

 

le soleil d'écorce

                     emporte sa flamme

jusqu'aux dernières aiguilles du pin

                flambant dans le bleu absolu

                                      devenu feu

 

c'est l'arbre-soleil

           avec ses branches éclatantes

                                        de soleil noir

      ses aiguilles-soleil

                     ses racines-soleil

sa sève sa nuit

                           ruisselantes de soleil

 

        beauté

                foudre vivante

        plantée en un lieu

 

impossible à rejoindre

                       défendue par le feu

 

               absolument isolée

 

je la regarde d'une autre rive

          et pourtant la reconnaît

                    à l'instant

                                     où elle m'aveugle

 

nuit adorable de ce monde

                     beauté sans feu ni lieu

 

dont le désir

                         bienheureusement

            me garde séparé.

 

 

 

 

Jean Mambrino

Sainte Lumière

Desclée de Brouwer, 1976

 

 

 

 

   Zao Wou-Ki

 

 

 

 

 

3 mars    Vert

 

 

Je parlerai du vert,
Du vert volant des arbres ;
Je parlerai des veines vertes
Des jeunes filles sous les arbres ;
Je parlerai du vent
Et du vert émeraude
Des lisières de l’aube.
Je parlerai du vert que j’aime,
Du vert ardent
Des baisers scellés dans les champs,
Du vert qui me retrouve enfant
Traversant sans fin mes printemps.

 

 

 

Maurice Carême

La flûte au verger

1960

 

 

 

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Bonne lecture !

Sylvie Gaté