Et puis je vous revois, ô ypréaux ¹ d'argent,
Dénudés en cette journée de semaison :
Et les molles fumées du brouillard matinal
En volutes dorées entourent les sarments.
Naguère s'entrouvraient vos bourgeons sous ce vent
Qui aujourd'hui fait tournoyer ces feuilles jaunes ;
Et moi qui ces jours-là criai au temps : « Chemine ! »
Je sens mon cœur baigné de larmes, à présent.
À présent, les neiges figées sur les montagnes,
Et les pluies livides, et la longue furie
De la bise qui vient cogner aux portes,
Et les jours brefs aux allures de crépuscules
Sans fin, et tout ce pâlir et ce défleurir,
Et la fleur de la mort, le chrysanthème.
Giovanni Pascoli
Anthologie bilingue de la poésie italienne
Bibliothèque de la Pléiade
Gallimard, 1994
¹ L'ypréau, variété d'orme à feuilles larges, tire son nom de la ville flamande d'Ypres. Il parut si beau à Louis XIV qu'on en planta à Marly. On donna par la suite ce nom au peuplier blanc, gattice, auquel Pascoli rend ici ses lettres de noblesse. |
I Gattici
E vi rivedo, o gattici d’argento,
Brulli in questa giornata sementina :
E pigra ancor la nebbia mattutina
Sfuma dorata intorno ogni sarmento.
Già vi schiudea le gemme questo vento
Che queste foglie gialle ora mulina ;
E io che al tempo allor gridai, « Cammina »
Ora gocciare il pianto in cuor mi sento.
Ora, le nevi inerti sopra i monti,
E le squallide piogge, e le lunghe ire
Del rovaio che a notte urta le porte,
e i brevi dì che paiono tramonti
Infiniti, e il vanire e lo sfiorire,
E i crisantemi, il fiore della morte.
Giovanni Pascoli