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Borges disait...
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Borges disait qu'il n'avait que des métaphores universelles le fleuve et le temps le sommeil pour la mort par exemple eh bien ajoutons-y les arbres pour la lumière avalée puis expirée dans les fruits et les ombres qui sont aux poètes (aux nomades) la seule frontière |
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Jean-Pierre Siméon
Illustration : Henri Galeron
Les arbres...
Les arbres ignorent les lois de la propriété.
Quand on pense les retenir et les enfermer, ils s’échappent par les rais de lumière. Si la lumière décline, ils oublient les frontières et imposent silencieux leur immense liberté. Ils traversent le temps qui passe en offrant la dignité de leur vieillesse. Les murs sont inutiles. Les feuilles, la sève et l’écorce, poursuivent en plein jour le cheminement insoupçonné : les racines vont loin, très loin, elles s’étalent comme des doigts pour repousser les limites devenues invisibles. La nature conquise en apparence, reste la déesse des lieux, comme l’enfant que l’on croit diriger mais qui est notre guide. |
Imasango
Outremer
Trois océans en poésie
Anthologie par Christian Poslaniec et Bruno Doucey
Éditions Bruno Doucey, 2011
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Sophie Cantou Expansion |
Si tous ces arbres...
Si tous ces arbres se donnaient la main ils feraient reculer le désert
Abdellatif Laâbi Le soleil se meurt La Différence, 1992
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![]() Aziza Alaoui La Danse des Arbres |
L'arbre aux mille couleurs
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Jean Mambrino ainsi ruse le mystère José Corti, 1983 |
Limite
![]() Linda Dessel |
Ces pins qui dansent dans le vent glacial — au nord du néant.
Limit
Pines dancing in the icy wind — north of nothingness.
Kenneth White L'Ermitage des brumes Occident, Orient et au-delà Éditions Dervy, 2005
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Il y avait...
Il y avait le maître des saisons
un arbre rouge, un artiste de la lumière
en été à l'écoute de son ombre.
Aujourd'hui, les murmures du soir ont disparu.
De sa trace en terre au vide céleste,
une ligne s'égare dans l'infini
et dessine son double illusoire dans le souvenir,
lui, immobile, le veilleur d'éternité.
Yves Buin
La ligne des arbres
15 poèmes pour la Méridienne Verte
2000
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L'exil
Celui qui longtemps vécut
dans la lumière du jardin
et l'amitié des arbres et des fleurs
un poing géant de nuit
soudain le frappe
et la sentence tombe de l'exil.
Un mur est là devant
qu'il faut franchir.
Étrangement il le traverse
Laissant au creux la mémoire du rêve.
Au-delà s'annoncent l'errance,
l'âpre labeur,
le combat avec les ombres.
Jean Joubert
L'alphabet des ombres
Bruno Doucey, 2014
Il y a des passages....
Il y a des passages qui s’enfoncent dans le bois
des sentiers qui serpentent, tournent, se croisent
et se croisent encore, reviennent sur eux-mêmes
et une sensation de clôture, qui interdit
toute idée de retour, une coupure
une délimitation où que nous soyons
There are ways through, deeper into the wood
paths that twist, turn, cross
and re-cross, come round on themselves
and a closing behind, which allows
no though of going back, a cutting off
a boundedness wherever we are
Geoffrey Squires
Poème en trois sections
Traduit de l'anglais (Irlande) par François Heusbourg
Éditions Unes, 2016
Le hêtre
Où vire en plein bois la limite imaginaire
De mes terres on a planté un piquet de fer
Et disposé autour un tas de vrais rochers.
Et en pleine nature, à cet endroit sauvage
Où ils ont été enfoncés et entassés,
Un arbre, que l'on a profondément blessé,
A ainsi été marqué comme Arbre Témoin
Afin de graver à jamais dans la mémoire
La preuve que je ne suis pas illimité,
Vérité établie donc et corroborée,
Bien qu'accompagnée d'obscurité et de doutes,
Oui, bien qu'entourée de tout un monde de doutes.
Dans les régions boisées des Etats-Unis les limites des propriétés, autrefois du moins, étaient indiquées au moyen de bornes de diverses sortes, mais, pour plus de précaution, dans le voisinage de ces bornes, on enlevait une plaque d'écorce sur certains arbres et on gravait dans le bois le nom du propriétaire. (On peut déplacer des bornes, mais non des arbres). Ces arbres ainsi marqués s'appelaient arbres témoins (witness trees). |
Robert Frost
Par Roger Asselineau
Pierre Seghers Éditeur, 1966
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Where my imaginary line
Bends square in woods an iron spine
And pile of real rocks have been founded.
And off this corner in the wild,
Where these are driven in and piled,
One tree, by being deeply wounded,
Has been impressed as Witness Tree
And made commit to memory
My proof of being not unbounded.
Thus truth's established and borne out,
Though circumstanced with dark and doubt
Though by a world of doubt surrounded.
Robert Frost
A Witness Tree
Henry Holt, 1942
Une rangée d'arbres
Une rangée d'arbres tout là-bas, là-bas vers les coteaux.
Mais qu'est-ce qu'une rangée d'arbres ? Il y a des arbres, c'est tout.
Rangée et le pluriel arbres ne sont pas des choses, ce sont des noms.
Pitoyables, les âmes humaines, elles qui mettent tout en ordre,
Qui tracent des lignes de chose en chose,
Qui mettent des pancartes portant des noms sur les arbres absolument réels,
Et qui dessinent des parallèles de latitude et longitude
Sur la terre même, la terre innocente et plus verte et fleurie que tout ça !
Fernando Pessoa
je ne suis personne
une anthologie
Christian Bourgois éditeur, 2007
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Photographe : Aquartistiq
Una Hilera de árboles allá lejos, allá en la cuesta.
Pero ¿qué es una hilera de árboles? Sólo hay árboles,
La hilera y el plural árboles no son cosas, son nombre.
Tristes de las almas humanas, que ponen todo en orden,
Que trazan líneas entre cosa y cosa,
Que ponen letreros con nombres en los árboles absolutamente
reales,
Y dibujan paralelos de latitud y longitud
¡Sobre la propia tierra inocente y más verde y florida que esto!
Fernando Pessoa