4 décembre 2022 7 04 /12 /décembre /2022 09:40

 

 

                                         Un jour nous retournerons au vrai humus.

                                                          Daniel Bigat, l'amour d'Amirat

 

 

« Or je suis le bois de Kobyłka. Je suis le bois de Kobyłka et ces pages sont à la forêt  au carbone  aux mousses et aux bêtes. Ces pages sont aux errants  aux cailloux  aux poussières et à l'humus. Elles sont à la pourriture ligneuse, aux lichens, lichens  aux rongeurs. Ces pages sont aux noms des bois  à ceux des forêts tout autant qu'aux innommés. Ces pages sont aux bruyères  aux fougères  aux tourbes et aux lombrics. Elles sont aux terriers. Elles sont à l'irrégularité. À l'imprévu. Au perpétuel. À l'enfoui au très très enfoui. Ces pages sont aux crasses — aux nanoparticules de plastique et aux simples comestibles. Ces pages sont à la transmission — aux cercles de feu — aux clairières. Elles reviennent aux tisanes de conifères — à l'expression des silences — et au tambour chamanique. Oui. Oui. Oui, je suis le bois de Kobyłka et je suis chargé du dit. Je suis chargé de cela. Je suis chargé de cela et je m'en acquitte ici. C'est — c'est cette vérité — cette vérité que je suis venu apporter. Car ici j'abrite vos semblables — les oubliés — les disparus — les lointains — les silhouettes. J'abrite ceux qui ont perdu leur nom. Ceux qui ont perdu le lieu du sommeil. Les inconnus. Les derniers endormis. Les soulevés. Ceux qui marchent encore. Kobyłka. Je suis le bois de Kobyłka. Je suis le bois de Kobyłka et je n'ai pas peur du poème. Je n'ai pas peur du mot. Je n'ai pas peur de la page. J'ai là en moi enfouis des millénaires de bêtises et d'amour. Et ça se mélange. Ça se mélange dans le carbone — dans le mycélium — dans les bactéries. Rongeur rongé bois de Kobyłka ça voilà : j'ai tout senti et je continue — debout. J'ai vu. J'ai vu. J'ai vu les coups de ciseaux sur l'écorce d'un chêne. J'ai vu le sac plastique laissé au bord du chemin. J'ai vu la bête morte qu'une famille est venue enterrer. J'ai vu les pleurs d'un vieil homme un après-midi d'été et ceux d'un chien — abasourdi ! J'ai vu encore le diésel me traverser. Les dépôts d'ordures. L'errance d'une femme. Les corps nus l'un contre l'autre. Les feux de camp. Les paniers de champignons. La peur des bêtes. J'ai vu la peur des bêtes — l'éternelle peur des bêtes — leur repli — refuge — abri. Voilà. Voilà tout est là. J'étais le bois de Kobyłka ».

 

 

 

 

Sébastien Ménard

Quelque chose que je rends à la terre

L'esquif, 2021

 

 

 

 

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Sylvie Gaté