Un arbre trempé de pluie
est immobile dans le jour gris,
et toutes ses feuilles,
autour de lui,
grelottent de long ennui.
Un arbre dans le ciel...
et soudain cette odeur l'environne,
cette odeur ancienne,
cette odeur mouillée si fraîche à mes narines,
cette odeur...
Elle entre en moi comme une enfance.
Je vais vers l'arbre,
je vais,
le visage levé,
vers ses feuilles, odorantes et mouillées,
qui me caressent au passage.
Elles avaient cette odeur autrefois,
cette odeur, fine et nostalgique,
où toutes les violences
de l'enfance
mouraient dans un parfum de pluie ;
une odeur ancienne,
trempée de pluie que tous ont oubliée,
et qui est revenue vers moi,
à travers tant de jours hors d'usage ;
qui est sortie de cet arbre-là,
un arbre immobile et lourd de pluie
dont l'odeur rêve,
dans l'ondée d'aujourd'hui,
à mon enfance.
Constant Burniaux
Poésie 1922-1963
Le Cherche-Midi, 1965