Dans la cheminée, le feu ne prend pas aux branches du peuplier. Elles semblaient sèches mais les flammes n'illuminent que journaux et brindilles. Rien n'a pu réchauffer le bois, son restant de sève.
Il flambait haut et vert dans le ciel, le peuplier il y a dix-huit mois ! Sa longue flèche dépassait les toits du hameau, nous faisait signe de loin. Devenu trop grand on dut le couper de peur qu'il s'abatte un jour de tempête. Par tronçons, les élagueurs l'ont fait choir puis l'ont rangé en rondins et fagots. Mauvais bois pour les flambées. Il n'était bon que vivant, en pleine sève. Comme nous. Une fois mort, nous n'offrirons pas même un piètre feu.
Âtre froid. Ce soir, s'échappe le pathétique appel de son vert, le chagrin d'un sang qui n'a plus motif de faire son chemin. Plus jamais il ne s'aventurera dans l'espace. Sinon celui intime et amical, bleu et ventilé de la mémoire. Il ne donnera pas prise à l'oubli. |
Jeanine Salesse
La rose de carême
La Part Commune, 2008