L'arbre était entouré de labyrinthes
Il apparaissait en rêve ou derrière une fenêtre.
Il nous excluait de la vie comme une passion étrangère.
Perdu dans sa propre mémoire
et parmi ses voix errantes
il disparaissait par les portes dérobées du matin
il apparaissait là où personne ne l'attendait
chargé de fleurs et d'abeilles
comme un prêtre qui murmure sa folie paisible
dans l'éclat d'un feu immobile.
Théâtral et lointain
il confondait la caresse et l'étreinte.
Derrière une photographie de famille il montrait
un visage hagard
fait de nuages et d'oiseaux.
Ou bien nous l'oubliions l'arbre.
Nous voyagions en chemin de fer
sur la terre irréelle.
Brusquement nous traversions le fracas
de ses chansons vagabondes
et l'arbre s'éloignait pour toujours
comme un poète dans la foule.
El árbol se rodeaba de laberintos
aparecía en sueños o detrás de una ventana
y nos excluía de la vida como la pasión ajena.
Perdido en su propia memoria
y entre sus voces errantes
desaparecía en las puertas falsas de la mañana
y aparecía allí donde nadie lo esperaba
cargado de flores y de abejas
como un sacerdote que murmura su locura apacible
bajo el estallido del fuego inmóvil.
Teatral y lejano
confundía la caricia y el abrazo.
Mostraba detrás de una fotografía de familia
un rosto azorado
hecho de nubes y de pájaros.
O bien olvidábamos el árbol
viajábamos en trenes
por la tierra irreal
y de pronto atravesábamos el estruendo
de sus canciones vagabundas
y el árbol se alejaba para siempre
como un poeta en la muchedumbre.
Luis Mizón
Poème du sud
et autres poèmes
Traduit de l'espagnol par Roger Caillois
et Claude Couffon
Gallimard, 1982