Le Centre ville est en travaux on dirait la guerre
Rues excavées tuyaux ouverts sans plaies ni sang
Rails nouveaux creusés de part en part
Câbles arrachés arbres vieux qu'on déracine
Adieu for intérieur ! Je m'élance dehors
Me livre aux sirènes d'alarme aux scies des élagueurs
Je me saoule de bruits jusqu'à perdre le sens
Qui vive ? Après le passage clouté je suis libre
Personne ne me connaît joie de n'être personne
Au-dessus des toits du haut de ma fenêtre
Dressé au carrefour je contemple l'Arbre Unique
Le splendidement feuillu ginkgo biloba
Il remplace l'horloge aux aiguilles arrêtées
Fossile vivant seul arbre sur l'aire minérale
À tous les croisements l'Arbre saint les saintes Fleurs
Les autos tournent autour en anneaux concentriques
On croirait un ballet propitiatoire
Un rituel sacré d'adorateurs des cycles
Des poussées saisonnières des feuilles et des fruits
Coups de klaxons injures m'expulsent de ma rêverie
Ce ne sont que pauvres otages crispés à leur volant
Qui clignotent alignés dans la nuit machinale
Prisonniers du flux
Dociles au sens giratoire
Joëlle Basso
Poésie 1, n°51
Éditorial Poésie Un