à la mémoire de Pierre Gabriel,
Avant l'homme l'arbre ne savait pas
qu'une carène de bateau
qu'une poutre habitait son torse,
que des meubles rêvaient en lui
de vie facile, de beauté...
Avant l'homme
le silex ne soupçonnait pas
que le feu l'habitait encore.
L'animal errait libre et farouche
selon sa règle et son instinct,
le nuage, dans sa colère,
n'avait qu'une flèche de mort
pour des tonnes de vie...
Après l'homme
les maisons ont oublié l'arbre,
méprisé la pierre trop personnelle,
l'animal a subi son enclos, sa mangeoire,
l'homme son travail programmé.
Le feu, redevenu folie sans maître
a pulvérisé l'arbre,
détruit la maison, les troupeaux...
Il pourra même effacer l'homme.
Armand Monjo
Dans la peau du monde
Rougerie, 1997