L’arbre était blanc, planté dans le champ non loin de sa maison, irradié par ce soleil vert, avec des étoiles de lumière au bout des branches. Heureux de le reconnaître, l’enfant le contemplait, il lui parut vieux et sans âge, si nu dans le crépuscule beige et gris qui subitement succéda au flamboiement du couchant. Si blanc ! Et si noir dans cette autre moitié de lui-même ! Et surtout si triste avec son ombre couchée dans la terre humide et glacée !
Non, l'arbre n'était pas blanc. C'était l'enfant qui le voyait blanc parce que le ciel, avant la nuit, s'était détaché de la terre sombre pour chasser ses nuages et prendre l'air impassible des témoins impuissants. Et ce ciel blanc, rassurant, donnait à l'enfant la joie tranquille des regards sans nuages. Le lendemain, quand il se lèva, l'arbre était encore là !
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Yves Labat
Paroles d'arbre
Éditions de l'Amitié, 1979
Illustration : Monique Michel-Dansac