Je l'ai bien reconnu, mon arbre
il était rouge et tordu
il glissait en flammes alléchantes
il suffoquait en noir de fumée
il craquait avec un pétillement d'infarctus
il ressemblait peut-être à un cœur en perdition
mon arbre n'avait pas d'âge
il capitait comme un vieux bordeaux
il descendait majestueusement en escalier d'opéra
il sentait fort
et l'on criait parfois « sus à l'ennemi »
par la main assujettie sur la massue levée
mon arbre était sans doute chêne
sur l'ombre d'un roi dévoré de vermine
ou bien toute autre chose
par exemple une allumette ou un cadre biseauté
ou un cercueil ou une boîte à ressort
qui fait sortir le diable en quatre
Dominique Dieterlé
Poésie de Bretagne aujourd'hui
Anthologie de Max Pons
La Barbacane, 2002