Ils ont un arbre qu'ils nomment "père"
et un autre dont ils sucent le lait
— dans la forêt ils ne sont jamais seuls.
Leurs retraites sont bâties de branchages
entrelacés de longs rubans de feuilles
— dans la forêt ils ne vont jamais nus.
Pour oreiller ils gardent un billot de bois creux
où se loge leur esprit pour songer
et c'est ainsi, croient-ils, que l'homme "pousse"
— dans la forêt ils parlent sans arrêt.
L'homme est fait, disent-ils,
"d'un tronc planté debout sur deux fortes racines,
étendant vers le ciel deux branches à cinq rameaux,
à la pointe un bourgeon où l'arbre tient ses rêves"
— dans la forêt ils saluent leurs pareils.
Ils vont : gestes de branches
s'arrêtent : stature de tronc
s'asseyent : appuis de souche
se couchent
comme l'arbre en son ombre.
(...)
Daniel de Bruycker
Ghazâls des Hu
L'Amourier, 2004