Peupliers de mon ciel natal, harpes étranges
Qui vibrez sur la rive où s'écrasent les franges
Des boutons d'or et des chardons,
Peupliers du pays de rêve et d'aube blonde,
Chantez ! Chantez ! loin des mépris lâches du monde,
Dans l'auréole des pardons !
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Et puis, dans la douceur des soirs baignés de lune,
Quand l'eau s'endort, quand nul clapotis n'importune
L'humble berge aux sentiers perdus,
Fils de la terre en deuil, surgissez, taciturnes,
Comme les bras raidis des tristesses nocturnes
Vers le grand ciel sourd étendus !
Je vous entends, du fond de la ville malsaine.
Chansons des bois, soupirs divins frôlant la plaine,
Vieux accords longtemps oubliés.....
Et mon âme qui rêve à la terre natale
Vole vers vous, là-bas, — là-bas, — dans le ciel pâle,
Ô mes sublimes peupliers !
R. Christian-Frogé
Poètes angevins d'aujourd'hui
Anthologie par Marc Leclerc
Paul Lefèbvre, 1922