Je prendrai ma retraite au cœur des mimosas,
dans quelque port du Sud. Les joueurs de pétanque
m’inviteront à partager la pleine lune
qu’on lance comme un fruit contre les songes fous.
J’irai dormir à bord de ces bateaux minés
où l’équateur frileux se meurt à fond de cale.
J’enverrai chaque jour mon salut aux collines
pour que des dieux mouvants, sur un air inconnu,
chantent la fin du monde. Aux passants je dirai
que l’azur va tomber sur leur front, et qu’il faut
s’en défendre. Un cyprès pourra m’entretenir
de ses malheurs. J’insisterai qu’à l’hôpital
on prépare mon lit pour la vieille comète.
Je soignerai des mots menacés par l’oubli.
Alain Bosquet
Notes pour un pluriel
Gallimard, 1974