J'aurais passé le dernier été de ma jeunesse
à soigner un tilleul de hollande
et un rossignol du japon
malades à compter leurs feuilles leurs secondes
l'un n'était-il pas ma beige lenteur
l'autre ma muse fleurie nourrie d'éphémères
mais tous les deux ont crevé !
Pour ma console j'élève depuis ce temps-là
en chemise à carreaux dingo chapeau pompadour
des noyers miraculés
des bébés magnolias gâtés d'or.
Et souvent triste à mourir à vingt ans déjà
je me retournerai devant la porte étroite de la vieillesse
sans femme-les-enfants-d'abord
la verge vierge la feuille de vigne sans fruits !
avec seulement des souvenirs d'ombres d'arbres à tous les doigts de la main
et la poterie de ma tête fêlée par la force d'un lierre intérieur
orange et violâtre.
Mais que de fois j'aurais recueilli la bruine du lyrisme des choses
et joui de nuits roses.
O mourir au sein de la pelouse de trèfles en fleurs blanches
pleines d'abeilles blondes
comme devant le blason de mon oncle
à genoux devant l'orme pleureur d'or de toute poésie
le cœur cuit de soleil bleu
l'air parfumé de musique ancienne.
Jean-Paul Klée
L'Eté l'Eternité
Chambelland