Les forêts de teck ne ressemblent en rien aux autres forêts que j'avais parcourues jusqu'ici en Indo-Chine. Ce ne sont plus les inextricables lacis de lianes et de rotins de la forêt vierge, où les différentes essences sont mélangées, où le spectacle change à chaque pas, mais où la vue pénètre rarement à plusieurs centaines de mètres : ici tout paraît régulier et l'on croirait ces forêts plantées par la main de l'homme. Les troncs, immenses et bien verticaux, s'élèvent à trente mètres et plus sans donner une branche, puis la frondaison s'étale horizontalement, formant une voûte épaisse et continue ; on voyage dans ces forêts comme entre les piliers d'un temple gigantesque. Les feuilles de teck, larges, lourdes et luisantes, qui servent dans le pays à faire des toitures résistantes, tombent toute l'année et recouvrent le sol, en sorte que pas un buisson, pas un brin d'herbe ne pousse en ces forêts, ce qui contribue à leur donner un aspect tout particulier. |
Paul Néis
Anthologie franco-indochinoise
Imprimerie Le Van Tan (Hanoï), 1927