Toujours l'un, le peuplier,
au bord de la pensée,
Toujours le doigt qui se dresse
à la lisière.
Loin devant,
le sillon hésite dans le soir.
Mais le nuage :
passe.
Toujours l'œil.
Toujours l'œil dont tu lèves
la paupière à la lueur
de sa sœur baissée.
Toujours cet oeil.
Toujours cet œil dont le regard
entoure de son fil le peuplier, l'un.
Paul Celan
De seuil en seuil
Christian Bourgois éditeur, 1991
♦
Die felder
Immer die eine, die Pappel
am Saum des Gedankens.
Immer der Finger, der aufragt
am Rain.
Weit schon davor
zögert die Furche im Abend.
Aber die Wolke:
sie zieht.
Immer das Aug.
Immer das Aug, dessen Lid
du aufschlägst beim Schein
seines gesenkten Geschwisters.
Immer dies Aug.
Immer dies Aug, dessen Blick
die eine, die Pappel umspinnt