Où vire en plein bois la limite imaginaire
De mes terres on a planté un piquet de fer
Et disposé autour un tas de vrais rochers.
Et en pleine nature, à cet endroit sauvage
Où ils ont été enfoncé et entassés,
Un arbre, que l'on a profondément blessé,
A ainsi été marqué comme Arbre Témoin
Afin de graver à jamais dans la mémoire
La preuve que je ne suis pas illimité,
Vérité établie donc et corroborée,
Bien qu'accompagnée d'obscurité et de doutes,
Oui, bien qu'entourée de tout un monde de doutes.
Dans les régions boisées des Etats-Unis les limites des propriétés, autrefois du moins, étaient indiquées au moyen de bornes de diverses sortes, mais, pour plus de précaution, dans le voisinage de ces bornes, on enlevait une plaque d'écorce sur certains arbres et on gravait dans le bois le nom du propriétaire. (On peut déplacer des bornes, mais non des arbres). Ces arbres ainsi marqués s'appelaient arbres témoins (witness trees). |
Robert Frost
Par Roger Asselineau
Pierre Seghers Éditeur, 1966
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Where my imaginary line
Bends square in woods an iron spine
And pile of real rocks have been founded.
And off this corner in the wild,
Where these are driven in and piled,
One tree, by being deeply wounded,
Has been impressed as Witness Tree
And made commit to memory
My proof of being not unbounded.
Thus truth's established and borne out,
Though circumstanced with dark and doubt
Though by a world of doubt surrounded.
Robert Frost
A Witness Tree
Henry Holt, 1942