Je caresse à nouveau la douceur
du bois : planche,
planche de mon bureau,
compagne
des heures et des heures sur mes genoux,
où dans l'étonnement du papier
je trébuche, balbutie,
tandis que le plaid rapporté
des îles du nord me protège
du froid, aux heures où le brouillard
fait du Douro une muraille ;
planche qui m'a suivi
de maison en maison, de fleuve
en fleuve, lissée, polie
par des mains qui se sont égarées
dans l'envers des jours.
Eugénio de Andrade
Le sel de la langue
Traduit du portugais par Michel Chandeigne
Éditions de la Différence, 1999
Aricio uma vez mais
Acaricio uma vez mais a doçura
da madeira : tábua,
tábua do meu ofício,
companhia
de horas e horas sobre os joelhos,
onde no espanto do papel
tropeço, balbucio,
enquanto a manta trazida
das ilhas do norte me resguarda
do frio, em horas a que a névoa
faz do Douro um muro;
tábua que me tem seguido
de casa em casa, rio
em rio, aplainada, polida,
por mãos que se perderam
no avesso dos dias.