La feuille du pommier se détache petit à petit. Destin inévitable, depuis longtemps. L'arbre l'a rejetée sans même lui dire merci. Il y a bien longtemps elle s'est extraite elle-même de l'arbre, destin inévitable encore. L'arbre le voulait, la feuille est née, sans vouloir, elle a répondu par elle-même, quand on lui a commandé. L'arbre, quelqu'un. En ce temps-là, le monde avait un autre parfum, la lumière ruisselait. Les nuits échevelées viraient au jour, puis vint le temps des fleurs. Les abeilles, puis les fruits verts. Un duvet tendre recouvrait encore sa peau, avant que n'apparaissent les taches rouillées. Le temps est passé de plus en plus vite, le temps s'enfuit. Aujourd'hui il faut tomber, ce soir elle tombe. L'arbre ne bronche pas, l'arbre demeure. Toute chose a un sens, et l'arbre le sait. |
Pentti Holappa
Les mots longs
Poèmes 1950-1994
Traduit du finnois par Gabriel Rebourcet
Gallimard, 1997