Arbre dur sur le ciel au ventre des forêts,
prolongement de l'âme à l'encontre des vents,
érection du songe, attente et démesure
à portée de ce rêve où plongent les racines,
imaginaire espace entravé du désir
par branches et rameaux de veines vagabondes,
lente montée de sève au poitrail des saisons,
s'ouvre le temps promis de liberté d'offrande.
(Orage des profonds, des équinoxes rudes
en ramures de peau que désarme un présent
d'amertume oubliée au renouveau du corps,
quand les feuilles meurtries renaissent au baiser
des mots, et que déferle un éparpillement
de nerfs émerveillés, pour nouer ce dedans
de connaissance claire à l'astérisque peint
sur le haut bouclier des seins reconnaissants)
Toute ferveur de pluies — y sombrent les jardins
assoiffés du plaisir — s'immobilise en jeux
rassurants, éclairés d'une soif sauvagine,
tant l'azur du ciel double appartient au futur,
lumière reversée par la bouche du rêve
irriguée de l'eau douce à l'ivoire des dents.
Et l'arbre dur pénètre un silence de gloire,
lent à partager l'or écartelé de roses...
Jehan Despert
Orénoque
Subervie, 1981