En hiver les arbres écrivent à l’encre de Chine sur le ciel Les uns racontent la multiplication fractale de la poussée originelle Les autres dressent bien haut des hampes maigrelettes en consentant d’avance à l’écrêtage D’autres encore tracent soigneusement de vastes réseaux hydrographiques où les grands fleuves se rejoignent en un seul estuaire
Bien avant que nos ondes parcourent l’espace les arbres ont tissé dans le ciel des réseaux rassurants un entrelacs d’antennes où les conversations s’échangent en silence
Parfois vers le soir ou dans l’aube tardive les pages s’animent de rose comme un corps caressé qui devient déchiffrable
Le plus souvent sur l’écran transparent de l’hiver c’est la radiographie de nos artères, artérioles et capillaires que les arbres projettent Ils ne s’embarrassent pas de paroles inutiles vont droit à l’essentiel à cette pulsation commune du sang et de la sève qui nous irrigue et nous charpente
Et l’air a beau être tranchant comme la glace nous nous sentons alors plus accordés |
Michèle Monte
Fragile - Revue de Créations