Ma jeunesse est toujours du côté des glycines
sur le parterre imaginaire elle est restée
elle y cueille les vents et ne pense à personne
ma jeunesse vit seule et ses yeux te ressemblent
Et moi je vois l'été se détacher des branches
l'arbre se dédoubler au fond des lendemains
Déjà tous les passants ont leurs ombres d'automne
et je marche déjà dans la ville invisible
Je m'en vais peu à peu vers les lumières froides
je m'en vais par les rues qui se croisent trop loin
je m'en vais en levant les bras sous la grande arche
où m'attend l'Étranger qui ne dit jamais rien
Pourquoi faut-il toujours tourner autour du chêne
pourquoi faut-il aller tout près des espaliers
attendre tant d'oubli pour que l'oubli s'épuise
pourquoi faut-il aimer les voix méconnaissables
Ah ! Quand donc au matin verra-t-on ma jeunesse
offrir à tout venant le temps qu'elle a cueilli
ce temps que je cherchais et attendais sans cesse
par les yeux par le vent par le chêne et le gui
Septembre 72
Norbert Lelubre
Histoire sans limites
Traces, 1976