Des génies habitaient à l'intérieur des arbres
et sortaient le soir, quand il faisait grand vent
par un trou noir dans un nœud du tronc
où l'on ne pouvait passer que deux doigts
Le jardin entier devenait leur domaine
il n'était plus question d'aller dehors
et nous suivions derrière la vitre, anxieusement
les ravages de leur sarabande impalpable
Le matin, le jardin était presque intact
Il fallait se dépêcher, avec des brindilles
et des bouts d'écorce tombés
d'aller boucher le trou mystérieux
Puis on touchait le tronc, à demi rassuré
et l'on pouvait enfin jouer tranquillement
Jean-Pierre Lemaire
Le pays derrière les larmes
Gallimard, 2016