« Je te propose la Vie ou la mort, choisis donc la Vie, afin que tu vives. ¹ » Mais la vie ne résout rien dans la paix. Elle est tension. La vie ne te donne pas de solution. Elle te montre que le chemin passe devant toi. Elle ne va pas réconcilier les antagonismes de ce monde, les choix ou les avantages qui s'opposent et les camps toujours en conflit. Et c'est parce que la Parole a choisi la vie qu'elle te propose à la fois la paix et la guerre, la nuit et la lumière, qu'elle fait de toi un être affamé et rassasié. Ne pense pas que la vie te donne la paix. La vie ne résout rien sans crises. Choisir la vie c'est choisir les crises. Car la vie n'est pas dans le cœur de l'arbre. Elle n'est pas dans ce pilier central durci par les contradictions des cercles de l'aubier. Elle n'est pas dans le noyau imputrescible de ce chêne. Le cœur du chêne porte haut et droit le fût et distribue les branches. Il accumule les années de l'arbre, mais il ne porte pas la vie. Et la vie n'est pas non plus dans l'écorce, dans ce liège desséché et léger ; elle n'est pas dans cette peau gercée et attaquée de mousses et de lichens. La vie coule cachée sous l'écorce, elle monte sous le liège. Elle est osmose, tension, appel entre la nappe d'eau et la nappe verte. Elle est la crise entre la terre et le ciel. Elle est le cri d'un printemps qui se gonfle dans les chevelures des racines pour éclater aux couronnes de la cime. Ne choisis pas le liège sec, ne choisis pas le pilier durci, choisis la sève, choisis la Vie. Mais choisis alors d'être là où bouillonne la sève, où monte la Vie. Car le le lieu qu'habite la Vie se trouve toujours, et toujours, entre l'arbre et l'écorce.
¹ Deutéronome 30, 19.
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Louis de La Bouillerie
Je vous écris au pluriel
Éditions du Chalet, 1976