Je voudrais, dit l’enfant,
Lorsque l’été finit
M’asseoir sous un arbre
Recouvert de fruits d’or.
Ils tomberont sur moi
Des pieds jusqu’à la tête
Et je m’endormirai
Au milieu des trésors
Comme un prince comblé
Un soir de fête.
Je voudrais au printemps,
Dit une jeune fille à son amant,
M’allonger sur la terre
Quand les pétales tombent.
Comme Ophélie
Bercée par leur chute légère
Je flotterai
Pure, immobile à tout jamais
Ainsi qu’un songe d’éternité
Muré dans une vivante tombe.
Je voudrais, dit un homme las,
M’asseoir sur un tas
De feuilles ratissées par l’automne
Et le vent, en passant,
En fera sur moi pleuvoir des tonnes.
Ni les oiseaux dégringolant des branches
Ni les feuilles remontant au sommet
Ne sauront m’étonner,
Silencieux et déjà absent
Je resterai là, indéfiniment
Sans que nul ne s’en aperçoive.
Je voudrais lorsque viendra l’hiver,
Dit un vieillard aux cheveux de cendre,
M’abriter dans la neige sous la croix
D’un arbre foudroyé.
Enseveli par les mains de décembre
Aux cris du requiem chanté par l’ouragan
Je reposerai
Veillé par le silence
Je reposerai
Jusqu’à la fin des temps.
Meery Devergnas
Reflets dans le Miroir
Montréal, Éditions de la Marquise
1985