Dans la châtaigneraie se dresse
une tour solitaire. Bien que mutilée
par la foudre qui abrégea sa gloire
elle semble veiller toujours
sur d'anciennes possessions.
À ses pieds gisent des pierres
débris de sa couronne esquilles
tombées des murs ajourés.
De saison en saison le vent du temps
désagrège et disperse le même
essaim de feuilles et les bogues
éclatées libèrent ici un fruit stérile.
Soudain surgie d'entre les lèvres
de la plaie sommitale avant de se fondre
dans la futaie la pie-grièche de son cri
suspend l'humble et triste évocation
du poème. Ce cri vivant la tour de pierre
le prolonge dans sa durée silencieuse.
Jean-Pierre Chambon
Le Roi errant
Gallimard, 1995