5 —
Heureux les mots qui ne pourrissent pas,
mes vieilles sont en noir dans la terre
leur parole est dans l’arbre et dans l’étoile
avec le feu de leurs paupières.
Leur regard bleu
moins océan que cielnomme les choses d’ici-bas
disant l’immatérielle
muette beauté du pas :
Non pas la marche mais l’absence
le terrible creux de mort,
le silence
des bouches tendues vers le dehors
Criant avec l’ageasse
pour recréer le monde
à leur image et ressemblance
comme à la vie est pareille l’amande.
Ô cri dans le noyau sans écorce
disons nuit si la mort est obscure
leurs mots bien vivants s’efforcent
d’ouvrir mes blessures :
Langage qui saigne à la proue, rouge-gorge
épanoui sur le cœur du vent
j’entends parler dans le maïs et l’orge
mes très morts, mes très vivants.
Lionel-Édouard Martin
Avènement des ponts
Tarabuste, 2012