Le bois de noyers te révoque le jour,
Moussus, les soleils aux lisières se couchent :
Sur pile, verdâtre grenouille, ou vautour ;
Sur face, épaisseur, pourriture de souches.
Les touffes s'entrouvrent sur toi, mais pendant
Que tu t'accoutumes à leur farandole,
Le bois perd ses branches qui tombent en rang,
Les feuilles s'éclairent, l'oiseau, tel la yole,
Chantonne en écume et, coupant le chemin,
Dévore l'azur, périssoire plongeante :
Et passe... la sylve est muette soudain
Et garde les yeux sur la barque voguante.
Ô lieux où l'orage rejoint le sureau,
Brouillards encornés de lichens, paroxysmes
Où brûle, hébétant notre jeune cerveau,
Le mauve marais des défunts paganismes !
1917
Boris Pasternak
Ma sœur la vie et autres poèmes
Traduction sous la direction d'Hélène Henry
Gallimard,1988