(À M. Isido de Asua).
Les pins, les grands pins noirs qui barrent l'horizon,
Limitent mon tourment, peuplent ma rêverie ;
Et c'est comme une lente et bonne floraison
De pensers doux, éclos en mon âme attendrie.
Les pins, les grands pins noirs frissonnent par les nuits,
Ont des grondements fous de douleurs éperdues :
C'est le thrène des deuils et des mortels ennuis,
Cris d'humains écrasés sous les tâches ardues.
Les pins, les grands pins noirs aux flancs toujours ouverts,
Sous le soleil qui fait tomber leurs larmes blanches,
Impassibles, muets, raidissent là-haut, vers
L'infini des cieux bleus, la touffe de leurs branches.
Les pins, les grands pins noirs qui semblent tout pensifs,
M'ont déjà reposé des lointaines tourmentes :
Leurs chansons valent mieux que vos discours poncifs,
Hommes vains, qui rêvez de conquêtes démentes.
Serge Barranx
Poètes des Landes
Les Éditions d'Aquitaine, 1958