Les amandiers ont colorié la toile aride.
Durant quelque temps
cette terre oubliée des dieux s'est parée :
corolles roses et blanches, incendie des collines orphelines.
Sur les parois de chaux dénudées,
le crucifix en bois d'olivier ̶ a grandi.
Chacun a repris son souffle :
un parfum d'invisible sorbet
apaise les plaies au cœur des hommes.
Au pied d'un figuier,
un autel à la nature
étale ses oranges et ses noix.
La nuit venue, la horde sauvage des chiens
laisse les collines, pénètre dans le village.
Ce soir, on ne les chassera pas,
au coin des venelles, on leur offrira les restes,
dans une assiette, et on regardera
comme ils se les disputent.
Demain les amandiers auront séché,
il faudra signer la toile, d'un peu de sueur.
Jean-François Patricola
Siciles
Alidades, 1997