(Juges IX, 8-15) (1)
Les arbres désirant un jour nommer un roi,
Dirent à l'olivier : sur nous viens régner ? moi !
Mon destin n'est-il pas de produire de l'huile ?
À Dieu comme aux humains ne suis-je pas utile ?
Irais-je m'agiter et prendre du souci
Pour le plaisir de commander, merci !
Ils allèrent offrir le sceptre qu'il dédaigne
Au figuier son voisin, toi, sur les arbres règne.
Le figuier répondit : je donne mon produit,
Pourrais-je refuser la douceur de mon fruit
Et quitter le repos que mon destin me donne
Pour l'éphémère éclat d'une vaine couronne ?
Ils dirent à la vigne : et toi ? règne sur nous.
La vigne répondit : quoi ! pour régner sur vous
Devrais-je renoncer à ma liqueur divine,
La santé, le régal de l'humaine poitrine ?
À l'épineux buisson le sceptre fut offert,
Il leur dit : oui, venez sous mon ombrage vert,
Sinon par une flamme en mon sein allumée
Tu verras, ô Liban, ta forêt consumée.
(1) Les enfants d'Israël oublièrent dans leur ingratitude Gédéon qui les avait délivrés de la main de tous leurs ennemis. Les chefs de Sichem choisirent Abimélec qui avait mis à mort les fils de Gédéon. Jotham, le plus jeune qui avait échappé au massacre, et qui se tenait sur le sommet de la montagne de Garizim dit cet apologue aux chefs de Sichem pour leur reprocher le triste choix qu'ils venaient de faire. |
Alfred de Montvaillant
Poètes bibliques : poésie des patriarches ;
cantiques de Moïse, Débora, David, Judith, etc.
Fischbacher, 1900