Pâle hêtre et pin bleu, plantés sur la même motte, branche à branche, ne pouvez-vous endurer la longueur de vos jours ! Quand les pluies glissent et bondissent, pourquoi souiller la douce camaraderie et laisser tomber sur le rameau voisin la goutte qui le flétrira ?
Cœur blessé, esprit infirme, accablé par la vie des villes, à ce bois je suis venu comme à un nid ; je rêvais que la paix sylvestre à l'âme torturée donnait le repos et que la Nature allégeait l'inquiétude des hommes.
Mais une fois là, grandes et petites essences se révèlent aux hommes semblables — toujours en lutte ! Le sycomore heurte le chêne, les plantes grimpantes asservissent le jeune arbre faible, les cordes que tisse le lierre étouffent les superbes ormes.
Les coups du frêne, ô sorbier, te piquent comme le mépris, et vous, nobles houx, vous fuyez l'embrassement de l'épine. Les peupliers alignés, eux-mêmes, supportent mal une rivalité et se rongent de désespoir s'ils sont dépassés.
Et puisque je ne trouve nulle pitié à apprendre des arbres, je m'en reviens à ma race qui est digne d'eux. Là du moins, les sourires rayonnent, la parole vibre partout, et là je découvre parfois que la vie a ses loyautés. |
Thomas Hardy
Poèmes
Traduction française de J. Fournier-Pargoire
Librairie de France, 1925
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In a wood